mercredi 12 août 2020

Le maréchal Pétain et ses trois "protégées"

La 8e ordonnance allemande interdisait aux Juifs de zone occupée, dès l'âge de six ans, de paraître en public sans porter l’étoile jaune. Elle entra en vigueur le dimanche 7 juin 1942. 

Cette affiche de propagande a été produite
en 1942, et apposée dans la France occupée
Cette nouvelle législation, présentée comme une mesure de maintien de l'ordre, est publiée au journal officiel allemand, le Verordnungsblatt für die besetzten französischen Gebiete
L'ordonnance comportait trois paragraphes :

1- Dès l'âge de six ans, les Juifs doivent porter l'étoile jaune en public.
L'étoile juive est une étoile à six pointes ayant les dimensions de la paume d'une main et les contours noirs. Elle est en tissu jaune et porte en caractères noirs l'inscription "Juif". Elle devra être portée bien visiblement sur le côté gauche de la poitrine, solidement cousue sur le vêtement.

2- Les infractions seront punies d'emprisonnement et d'amende ou d'une de ces peines. Des mesures de police, telles que l'internement dans un camp de juifs, pourront s'ajouter ou être substituées à ces peines.

3- L'ordonnance entre en vigueur le 7 juin 1942. (1)

L'étoile jaune arrive deux mois après le premier convoi de Juifs déportés à Auschwitz le 27 mars 1942, et un mois et demi avant la rafle du Vél d'Hiv du 16 juillet. 
Désormais, le Magen David, jusqu'alors symbole protecteur du judaïsme désignait publiquement les « coupables » et un prétexte aux arrestations...
Ce « marquage » à l’étoile jaune, « portée bien visible sur le côté gauche de la poitrine, solidement cousue sur le vêtement », pour reprendre le texte de l’ordonnance, restera le symbole suprême de la discrimination, de l'exclusion et de l'humiliation, facilitant la ségrégation et le repérage dans les espaces publics. 
« L’étoile juive » - terme utilisé dans l’ordonnance - a d’abord été instaurée en Pologne au 1er décembre 1939, sous forme d’un brassard, puis en Allemagne au 1er septembre 1941, aux Pays-Bas en avril 1942 et en Belgique au 1er juin 1942. 
Dans la France occupée, l'ordonnance est signée par le commandant militaire Carl-Heinrich von Stülpnagel.

83.000 étoiles distribuées 

Jusqu'au 17 juin 1942, 83.000 étoiles ont été distribuées dans les commissariats par la police française, en échange d'un point textile prélevé sur les cartes de rationnement. Le recensement de 1941 tablait sur 115.000 Juifs vivant en zone occupée. 
Pour Heinz Röthke, adjoint du chef de la section IV J de la Gestapo à Paris, chargé de la « Question juive » - il dirigea le camp de Drancy du 16 juillet 1942 au 2 juillet 1943 - la différence a une explication : des Juifs s'étaient réfugiés en zone libre, certains ont été déportés, d'autres n'avaient pas encore récupéré leur étoile. D'autres encore comptaient parmi les ressortissants provisoirement dispensés pour éviter des représailles contre les ressortissants allemands. (2)
Outre ces dispenses collectives, le dispositif dérogatoire des exemptions prévoyait des mesures exceptionnelles et individuelles : « Lors de circonstances spéciales, dans l'intérêt du Reich, des dérogations à l'ordonnance peuvent être prévues dans des cas isolés ». (3)
Un précieux certificat servait en cas de contrôle.

Seulement trois demandes du maréchal Pétain

CDJC-XLIXa-90a : lettre du 12 juin 1942 du maréchal Pétain à
Fernand de Brinon et note rajoutée par Bömelburg, chef de la Gestapo
Le 12 juin 1942, le maréchal Pétain exprime sa volonté d'obtenir des exemptions en faveur de relations mondaines féminines, nouées avant-guerre. 
Un courrier est adressé à Fernand de Brinon, son ambassadeur à Paris : 

« Mon Cher Ambassadeur,
Mon attention vient d’être attirée à plusieurs reprises sur la situation douloureuse qui serait créée dans certains foyers français si la récente ordonnance des Autorités d’Occupation, instituant le port d’un insigne spécial pour les Juifs, était appliquée sans qu’il soit possible d’obtenir des discriminations naturelles et nécessaires. Je suis convaincu que les Hautes Autorités Allemandes comprennent parfaitement elles-mêmes que certaines exemptions sont indispensables : le texte de la 8e ordonnance les prévoit d’ailleurs. Et cela me semble nécessaire pour que de justes mesures prises contre les israélites soient comprises et acceptées par les Français. Je vous demande donc d’insister auprès du Général Commandant les Troupes d’Occupation en France pour qu’il veuille bien admettre le point de vue que vous lui exposerez de ma part pour que M. le Commissaire Général aux Questions Juives puisse promptement obtenir la possibilité de régler par des mesures individuelles et exceptionnelles certaines situations particulièrement pénibles qui pourraient nous être signalées ». 

Cette lettre de Pétain « le stigmatise autant que la poignée de main à Montoire. Loin de protester contre l’étoile jaune, il la rend, en quelque sorte, officielle, en demandant aux autorités allemandes d’admettre à son port des cas personnels d’exemption » commentera Justin Godart (ancien ministre, qui fut parmi les 80 parlementaires n’ayant pas voté les pleins pouvoirs à Pétain en 1940), dans sa préface au livre de Léon Poliakov, « L’étoile jaune » (Editions du CDJC, 1949).

Une note en bas de page, du chef de la Gestapo Karl Bömelburg précise qu'il pourra s'agir de 100 cas et la liste devra être contresignée par le chef du gouvernement et les demandes classées d'après l'urgence et leur nombre, en y ajoutant l'identité exacte et les motifs détaillés. (4) 

Cette liste qui devait être transmise pour le 22 juin le sera finalement le 3 juillet. 
Elle se limitera à seulement trois demandes transmises à Brinon par Bernard Ménétrel, le secrétaire particulier de Pétain : 
« Le Maréchal a été heureux de savoir que sa demande avait été prise en considération et il a été sensible à la réponse qui lui a été faite. Vous voudrez bien, je vous prie, en son nom remercier les Autorités Allemandes de leur compréhension. Vous pourrez faire savoir que les dérogations ne peuvent être, dans l'esprit du Maréchal, que tout à fait individuelles et qu'elles ne seront dictées que par dès considérations d'ordre familial. Ainsi que vous me l'avez demandé, voici quelques renseignements concernant les deux demandes qui ont été formulées verbalement pour : 
1. Mme de Chasseloup-Laubat, née Marie-Louise, Fanny, Clémentine, Thérèse Stern, à Paris le 4 février 1879. Mlle Stern a épousé le 21 juillet 1900 à la mairie du 8e le Marquis Louis de Chasseloup-Laubat, aryen, ingénieur civil. La marquise est convertie au catholicisme le 21 août 1900, a eu trois enfants, tous mariés, la Princesse Achille Murat, le Comte François de Chasseloup-Laubat, la Baronne Fernand de Seroux. 

2. Mme de Langlade, née Lucie Stern (20 octobre 1882), sœur de la Marquise de Chasseloup-Laubat. Lucie Stern a épousé le 11 avril 1904 Pierre Girot de Langlade, aryen. Elle s'est convertie au catholicisme le 17 juin 1911. De ce mariage est issu un fils, Louis de Langlade, agriculteur.
 
Je pense qu'à ces demandes pourrait être jointe celle de Mme la Générale Billotte, dont je vous avais adressé la lettre reçue par le Maréchal, ainsi que copie de la réponse que je lui ai faite. » (5)

La marquise de Chasseloup-Laubat et deux de ses enfants 
par R. Mantovani-Gutty
Les deux sœurs Stern sont les filles du baron Louis Antoine Stern (1840-1900), dirigeant de la banque Stern, et de son épouse Ernesta-Miriam Hierschel de Minerbi (1854-1926). 
Elles ont deux frères, Jean (1875-1962), banquier mais aussi escrimeur célèbre, champion olympique en 1908, et Charles (1886-1940), mécène et artiste-peintre. 

Le père du marquis de Chasseloup-Laubat (1879-1964), Prosper de Chasseloup-Laubat (1805-1876) fut député, conseiller d’Etat et ministre de la Marine. 

Outre le mariage civil mentionné par Ménétrel, Marie-Louise Stern qui n'avait pas encore abjuré sa religion d'origine, se maria dans une chapelle de l'ancienne église Saint-Pierre de Chaillot, en toute intimité - le baron Stern était mort le 11 février 1900 - en présence des plus proches parents et des témoins : le frère du marié et l'oncle de la mariée, le banquier Jacques Stern, un des fondateurs de la Banque de Paris et des Pays-Bas, peu de temps avant sa mort. (6) 
Les trois enfants du couple sont Magdeleine (1901-1945), François (1904-1968) et Yolande (1907-1998). 

Mme de Chasseloup-Laubat obtiendra son exemption et échappera à la déportation. Le 9 janvier 1964, elle décède à Paris, à l'âge de 84 ans.
Assignée à résidence, elle disposait d'une autorisation de voyage pour " cause de maladie grave " afin de visiter sa sœur au château de Cuts (Oise) et sa fille au Yolande au château de la Mothe à Béthisy-Saint-Martin (Oise). Autorisation valable du 3 mars au 13 mai 1943, et prolongée jusqu'au 31 octobre 1944. (7)

Après guerre, son fils François de Chasseloup-Laubat sera le dernier visiteur de Pétain, prisonnier de l'Ile d'Yeu quatre jours avant son dernier soupir. 
Un témoignage consigné dans un album hagiographique, co-écrit en 1951 avec le Gal Weygand, Jean Tracou, ancien directeur de cabinet du maréchal, les académiciens Jérome et Jean Tharaud (antisémites notoires), et l'abbé Bailly, curé de l'Ile d'Yeu. 
En 1947 et 1948 il se rendra plusieurs fois à l'Ile d'Yeu et restera quelques jours auprès de la maréchale, pour l'accompagner jusqu'au pied du Fort où Pétain était détenu. (8) 

Pourquoi Pétain protégea les sœurs Stern ? 

L'influente famille Stern et le couple Pétain se connaissaient de longue date. 
Une relation entretenue au gré d'évènements importants. Pendant la Première Guerre Mondiale, en 1917-1918, le grand quartier général de Pétain se trouvait à Compiègne (Oise), à moins de 30 km du château de Cuts, propriété de la baronne Girot de Langlade. 
Il participait à des chasses ou à des dîners à leur domicile parisien de la rue Léonard de Vinci. Présidente de la Croix-Rouge de l’Oise, la baronne transforma son château en dispensaire militaire en 1914. En 1917, les Allemands incendient le château qui sera reconstruit en 1926. 
Yolande, la fille de Mme de Chasseloup-Laubat, qui se maria le 8 juin 1927 avec le capitaine de cavalerie Fernand de Seroux, en la Chapelle Saint-Louis des Invalides, avait pour témoins le maréchal Pétain et Jean Stern, son oncle. Le marié avait choisi le Colonel de Ganay et le général Charles Brécard, un proche collaborateur de Pétain, secrétaire général du chef de l’État de juillet à octobre 1940, puis à partir d'août 1942 président du Conseil de la Francisque, ordre instauré par le maréchal, et grand chancelier de la Légion d’honneur jusqu’en juillet 1944. (9) 

(Ndlr : Fabien Chalandon, fils de Salomé Murat et d'Albin Chalandon, et petit-fils de Magdeleine de Chasseloup-Laubat, nous apporte son témoignage : "le Maréchal Pétain était le témoin de mariage de Yolande de Chasseloup-Laubat, mais aussi de Magdeleine, sa soeur et ma grand-mère. De plus, le 27 juin 1942, Marie-Louise de Chasseloup-Laubat, née Stern, et sa sœur, Lucie de Langlade, déjà spoliées de leurs biens par les lois anti-juives, étaient arrêtées par la police française et remises à la Gestapo, pour être déportées. Marie-Louise échappa comme sa descendance à la furie antisémite nazie grâce à l’intervention de Philippe Pétain, le témoin de mariage de ses enfants. C’est sa petite fille, Salomé, née princesse Murat, qui se rendit à la demande de son père à Vichy à l’âge de 17 ans pour négocier cette intervention. Mais celle-ci ne put sauver sa grande tante, Lucie, baronne de Langlade, qui fut assassinée à Auschwitz, malgré l’intervention de Philippe Pétain. Les Allemands ne purent l'identifier à temps, étant enregistrée sous le nom de « Girod », chez les uns alors que chez les autres elle l’était sous le nom de « de Langlade ». ." 

En mai 1940, lorsque Pétain, encore ambassadeur en Espagne, rentre en France, il voyage dans le même train que la baronne, qui séjournait à Biarritz avant l'armistice. 

Mme Girot de Langlade (coll. particulière)
À la différence de sa sœur, la baronne de Langlade n'a jamais obtenu son exemption d'étoile contrairement aux écrits de  plusieurs historiens, souligne son petit-fils Bernard. (10) 
La baronne sera arrêtée par des Allemands à son domicile du château de Cuts, le 3 janvier 1944 à l'heure du repas. 
À bord d'un camion bâché elle est dirigée sur Noyon et pensait qu'il s'agissait d'un simple contrôle d'identité. 
Le 4, elle passe la nuit au camp de Royallieu et sera transférée à Drancy le lendemain. 
Bernard de Langlade tente une explication à cette arrestation : « Les allemands ont profité du fait que ma grand-mère était veuve depuis 1931. Elle était plus vulnérable que sa sœur qui n'a pas été inquiétée » (11)
À Drancy, sa famille cherchera à la faire libérer. Enregistrée sous le patronyme de Langlade, les démarches entreprises concernaient une dame Girot... 
Le 20 janvier 1944 elle fera partie du convoi n° 66 pour Auschwitz où se trouvaient, entre autres, la soeur de l’écrivain Max Jacob, Myrté-Léa, le champion olympique de natation Albert Nakache, sa femme et sa fille, et les parents du résistant Raymond Aubrac
Le 24 janvier 1944, Mme Girot de Langlade sera gazée dès son arrivée au camp, à 61 ans. 


26 exemptions le 25 août 1942 

CDJC XXVa-164 - La note de Röthke sur les 26 exemptions accordées
25 août 1942 : près de trois mois après la promulgation de la 8e ordonnance, une note de Heinz Röthke, chef du service juif de la SS de Paris, fait état de 26 exemptions. 
Elle est adressée au chef de la Sûreté, Helmut Knochen. (12) 
En tête de liste se trouve l’épouse de l'ambassadeur François de Brinon, la marquise Louise de Brinon, née Jeanne-Louise-Rachel Franck (1896-1982), issue d'une famille de la bourgeoisie juive belge, cousine du journaliste Emmanuel Berl, qui rédigea les premiers discours de Pétain. 
Mariée à 20 ans, en 1916, avec le courtier Claude Ullmann, avec qui elle aura deux enfants, elle divorça en 1934. 
Veuve en 1936, elle avait rencontré Brinon en 1932 par l'intermédiaire de René Massigli, futur ministre des Affaires Étrangères de la France Libre et ami de son jeune frère Henri, mort en 1912 de la tuberculose. Brinon a alors 47 ans. 
Journaliste, licencié en droit et en sciences politiques, Brinon signa  en novembre 1933 une interview de Hitler parue dans le quotidien "Le Matin". 
À 39 ans, "Lisette", convertie au catholicisme, épousa religieusement François de Brinon le 15 novembre 1935. 

L’exemption accordée à Mme de Brinon, valable du 13 juillet au 31 août 1942, sera prolongée jusqu'au 30 novembre 1942. (13)
L'épouse de l'ambassadeur résidait alors au château de Chassagne à Felletin (Creuse). L’ambassadeur Abetz précisera à Brinon qu’il serait souhaitable que sa femme y séjourne sans interruption au cas où elle ne réside pas en zone occupée. Le journaliste Bernard Ullmann, qui consacrera un livre à sa mère, précise qu'elle s'échappe "le plus souvent possible" de la propriété familiale pour se rendre à Vichy, tout proche, et deux à trois fois par an à Paris, où elle descend à l'hôtel Bristol, se gardant bien de mettre les pieds dans l'hôtel particulier réquisitionné - propriété de la princesse de Faucigny-Lucinge, d'origine israélite - ou au bureau de son mari, place Beauvau. (13 bis) 
Suivent « trois exemptions sollicitées par le Maréchal Pétain » sans mentionner les noms des personnes bénéficiaires. 
D’après des documents datés du 1er juin 1943, signés du SS Hagen, adressés à Brinon, les trois certificats d’exemption ont bien été délivrés en faveur de Mesdames de Brinon, de Chasseloup-Laubat et Suzanne d'Aramon et seront renouvelés jusqu'au 31 août 1943. (14) 

La comtesse Suzanne Bertrand de Sauvan d'Aramon obtiendra deux attestations d'exemption datées des 13 juillet et 31 août 1942. (15) 
Née Stern en 1887, elle est l'épouse de Bertrand de Sauvan d'Aramon (1876-1949), député Fédération républicaine du XVe à Paris de 1910 à 1914 et de 1928 à 1940, qui vota les pleins pouvoirs à Pétain en juillet 1940. 
Fille du banquier Edgar Stern (1854-1937) et de Marguerite Fould (1866-1956) elle est la cousine de Marie-Louise et Lucie Stern. 
La comtesse d’Aramon a deux frères, Hubert (1893-1972) et le banquier Maurice Stern (1888-1962). (16) 
En dépit de son exemption d'étoile et de ses appuis familiaux, elle sera arrêtée à Espalion, dans l'Aveyron, le 6 juin 1944, avec d'autres Juifs. (17) 
Envoyée à Drancy le 25 juin 1944, elle échappa à la mort et meurt en 1954 à l'âge de 67 ans. 

Les 22 autres exemptions d'étoile sont accordées pour motif économique (8), le contre-espionnage à la demande de l'Abwehrstell (7), la police anti-Juive (6) - CDJC-XXVa-165, XXVa-166 - et une du bureau VI N1 (service de renseignement) en faveur de Josef Hans Lazar (1895-1961). 
Né à Istanbul, ancien attaché de presse à l'ambassade d'Autriche à Berlin, Juif pro-nazi, chargé par Goebbels de la propagande du Troisième Reich en Espagne franquiste à partir de 1938, marié à la baronne roumaine Elena Petrino Borkowska. Recherché après guerre il restera protégé par le régime de Franco. (18) 

Les revanches de l'histoire

La veuve du général Billotte, née Catherine Nathan (1883-1965) était la fille de Ezra Nathan et de Rebecca Finkelstein. Elle s'était mariée le 11 mai 1904 avec le général Gaston Billotte (1875-1940). 
Cet ancien gouverneur militaire de Paris en 1937, mourra accidentellement sur une route de Belgique, à l'issue d'une réunion destinée à couper l'offensive allemande de mai 1940. 
Leur fils, le colonel Pierre Billotte (1906-1992) fait prisonnier le 12 juin 1940 dans la bataille des Ardennes, s'évadera d'un oflag de Poméranie et deviendra le représentant de la France Libre à Moscou. 
Echangé contre des réfugiés russes à Londres, il devient chef d'état-major du général De Gaulle et participa au débarquement en Normandie avec la division Leclerc. 
Le 24 août 1944, la bataille de la Libération de Paris commence... Le groupement Billotte arrive à la Croix-de-Berny à 19 h. 
A 20 h 45, le capitaine Dronne prend l'Hôtel de ville avec quelques chars.
A 21 h 30, le groupement Langlade arrive au pont de Sèvres. Il est commandé par le neveu de la baronne de Langlade, Paul Girot de Langlade (1894-1980).
Issu du 1er régiment de chasseurs d'Afrique en 1940, il rallia la 2e DB du Gal Leclerc en 1943. 
Le 25 août 1944 à 7 h 45, Billotte entre dans Paris avec ses chars et à 10 h il adresse un ultimatum au général von Choltitz, lui demandant sa reddition
Le commandant du Gross-Paris qui devait détruire Paris sur ordre d'Hitler acceptera de se rendre. 
A 14 h, le groupement Billotte est rejoint par le groupement Langlade arrivé place de l'Etoile. Une demi-heure plus tard, ils obtiennent que le quartier général allemand installé à l'hôtel Meurice rue de Rivoli rende les armes.
Promu général de brigade en septembre 1944 Billotte commandera la 10e division d'infanterie formée avec des FFI. Général de division en 1946, il ira représenter la France à l'ONU. Elu député RPF en 1951, il devient ministre de la Défense nationale du gouvernement Edgar Faure en 1955-56. 
Pendant la guerre d'Algérie, il prend position contre la torture. De 1966 à 1968, il sera ministre des départements et territoires d'outre-mer. Maire de Créteil de 1965 à 1977, il a soutenu la candidature de Jacques Chaban-Delmas à la présidentielle de 1974.
Langlade continua la guerre jusqu'à la prise du Berghof, le refuge d'Hitler. Il termina sa carrière militaire comme directeur de l'école de cavalerie de Saumur (1947-50) et au Cambodge (1952-54).


(1) CDJC-LXXXVI-63 Verordnungsblatt - Journal officiel n° 63 du 1er juin 1942.
CDJC-XLIXa-13 Lettre du 14 mai 1942 de Theo Dannecker au sujet de l'ordonnance introduisant le port obligatoire de l'étoile jaune en France.
(2) CDJC-XLIXa-38 Note du SS-Obersturmführer Heinz Rôthke à Théodor Dannecker, chef de la section IV J de la Gestapo à Paris, chargé de la « question juive », représentant d’Eichmann en France. 
(3) CDJC-CDXXVIII-82 Huitième ordonnance allemande. 
(4) CDJC XLIXa-90a et Serge Klarsfeld : " L'Etoile des Juifs" (L'Archipel 1992), p. 128 
(5) AN F60 1485 
(6) Cyril Grange : les alliances de l'aristocratie avec les familles de financiers Juifs à PARIS, 1840-1940 : déterminants socio-démographiques et débat religieux (Armand Colin, 2014) p. 75-93 
(7) CDJC-XXVa-175
(8) Album du Maréchal Pétain, Maréchal de France, 1856-1951 (Editions André Bonne, 1951)  
(9) Courrier de l'Oise du 19 juin 1927 
(10) Dans la seconde édition de « Vichy et les Juifs » (Calmann-Lévy, 2015), pourtant actualisée, Robert O. Paxton écrit que le maréchal Pétain « souhaitait » des dérogations pour trois femmes : la comtesse d’Aramon, la marquise de Chasseloup-Laubat et sa soeur, Mme Pierre Girot de Langlade. Paxton citait en référence l’ouvrage de Léon Poliakov, « L’étoile jaune », paru en 1949 et réédité en 1999, qui était plus affirmatif : « par l’entremise de Brinon, le maréchal demanda et obtint trois exemptions pour des « épouses d’aryens » appartenant à la haute société » mais il précisait dans une note de lecture seulement deux exemptions accordées à « la comtesse d’Aramon, la marquise de Chasseloup-Laubat » et rajoutait prudemment « un troisième cas que nous n’avons pas pu identifier ». En 1985, Maurice Rajsfus dans « La police de Vichy » (Le Cherche Midi), évoque « un certain nombre de dérogations au port de l'étoile jaune » (p. 109). Il cite seulement celles accordées à Mme de Brinon, à la comtesse d'Aramon et à la marquise de Chasseloup-Laubat. En 2002, dans son livre « Opération Etoile Jaune » (Le Cherche Midi), au chapitre 6 sur les demandes de dérogations, il souligne qu'il « convient d'épargner l'humiliation de l'étoile jaune aux épouses de personnages proches du pouvoir ». Il cite à nouveau Mme de Brinon, la comtesse d'Aramon, la marquise de Chasseloup-Laubat, mais il rajoute le nom de Mme Pierre Girot de Langlade sans apporter de nouvelle référence documentaire. (p. 70) 
L’écrivain Pierre Assouline, dans son roman « Lutétia » (Gallimard, 2005, p. 266) ajoute au trouble en mentionnant aussi la prétendue exemption d’étoile de Mme Girot de Langlade. 
A ce jour, aucun document du fonds d’archives de la Gestapo, conservé par le Centre de Documentation Juive Contemporaine, n’atteste de la supposée exemption de Mme Girot de Langlade. 
(11) Entretien avec l’auteur - novembre 2015. 
(12) CDJC XXVa-164  
(13) CDJC-XXVa-174 
(13 bis) Bernard Ullmann : Lisette de Brinon, ma mère - Une Juive dans la tourmente de la Collaboration (Éditions Complexe, 2004) 
(14) CDJC-XXVa-206a 
(15) CDJC-XXVa-172 
(16) En avril 1937, les obsèques d’Edgar Stern seront célébrées par le grand rabbin de Paris Julien Weill. L’hôtel particulier des Stern, au 20, avenue Montaigne, sera occupé par les Allemands et pillé. Leur propriété de Villette à Pont-Saint-Maxence (Oise), achetée en 1900, sera également envahie par les troupes d’occupation et les Jeunesses pétainistes, avant de devenir un centre de convalescence pour prisonniers et les troupes américaines. Maurice Stern, marié avec Alice Goldsmith (1906-2008), verra sa descendance perpétuer la banque Stern, avec leur fils Antoine (1925-1995), et leur petit-fils Edouard Stern (1954-2005), mort assassiné. Maurice Stern sera déchu de la nationalité française, par un décret de Vichy du 6 septembre 1940, pour avoir quitté le territoire national, en application de la loi du 23 juillet 1940. Son nom côtoie ceux de l’ancien ministre de l’Air Pierre Cot, cinq membres de la famille de Rothschild, David David-Weill, les journalistes Geneviève Tabouis, Henri de Kerillis, Emile Buré, André Géraud « Pertinax » et Elie Joseph Bois, rédacteur en chef du « Petit Parisien ». 
(17) Christian Font et Henri Moizet « Les Juifs et l'antisémitisme en Aveyron », Savoir et Faire, CDDP de Rodez - CDIHP Aveyron - CRDP de Midi-Pyrénées, 1994. (18) Jose María Irujo : La liste noire: les espions nazis protégés par Franco et l'Église, Madrid, Aguilar, 2003.

dimanche 2 août 2020

Colette par amour pour Maurice Goudeket

Le maréchal Pétain demanda aussi une exemption d'étoile jaune pour Colette ! Curieuse requête de la part du chef de l'Etat, étudiée le 17 juin 1942... Comment l'exécutif et l'ambassade d'Allemagne pouvaient-ils ignorer que la célèbre romancière, originaire de Bourgogne, n'était pas juive, alors que son mari l'était ?


Colette et Maurice Goudeket (dr)
Sidonie-Gabrielle Colette (1873-1954), s’était marié une première fois en 1893 avec le critique musical et romancier Henry Gauthier-Villars (1859-1931) qui l’encouragea à écrire ses premiers romans.

Divorcée en 1906, elle se remarie en 1912 avec Henry de Jouvenel (1876-1935), alors rédacteur en chef du Matin, avec qui elle aura son seul enfant, Colette-Renée

Jouvenel deviendra un homme politique influent : ministre de l’Instruction publique et des beaux arts en 1924, Haut-commissaire de France au Levant en 1925-26, ambassadeur en Italie en 1933, ministre des Colonies en 1934, sénateur en 1935.

Colette, directrice littéraire du Matin, est devenue à plus de 40 ans la maitresse de Bertrand de Jouvenel (1903-1987), le fils de son mari, âgé de seulement 16 ans. 

Divorcée en 1923 de Henry de Jouvenel, elle rencontre en 1925, à 52 ans, Maurice Goudeket (1889-1977) qui deviendra son troisième et dernier mari le 3 avril 1935. 

Courtier en perles, il mène la grande vie avec chauffeur et appartement dans le 16e arrondissement de Paris. 

Colette en fera son modèle pour le personnage de Vial, dans son roman La naissance du jour  publié en 1928.

Goudeket vivait avec Colette dans un appartement au dernier étage de l’hôtel Claridge, aux Champs-Elysées avant d’acheter une propriété à Montfort-L’Amaury.

Ruiné par la crise de 1929, il devient représentant d’une marque américaine de machines à laver. 

Colette le pousse dans le journalisme et avec Georges et Joseph Kessel, ils fondent l’hebdomadaire Confessions. En 1939, il fournit des chroniques régulières au quotidien Paris Soir, participe à Marie Claire et lorsque la guerre éclate il est directeur littéraire à Match

Lors de l’exode de juin 1940, ils tombent sur un barrage routier allemand et Colette est prise pour une juive avec son assistante Pauline Vérine. Maurice Goudeket dira en allemand : «  Moi seul ici suis de naissance juive ». (1) 

Ils ne seront pas inquiétés et se réfugieront au Château de Curemonte, en Corrèze, propriété de la fille de Colette, Colette de Jouvenel qui y réside. 

Rentré à Paris en septembre Maurice Goudeket ne peut plus travailler…

En juin 1941 Colette publie le feuilleton «  Julie de Carneilhan » dans Gringoire, magazine collaborationniste et antisémite.

Goudeket sera arrêté par la Gestapo au domicile de Colette, au 9 rue de Beaujolais, à deux pas des jardins du Palais Royal, le 12 décembre 1941, lors de la « rafle des notables » où 743 personnalités juives françaises sont transférées au Camp de Royallieu à Compiègne.

Lors de son arrestation, Colette l’aide à faire sa valise : « Elle m’accompagna jusqu’au départ de l’escalier. Nous nous regardâmes. Nous étions l’un et l’autre souriants, nous échangeâmes un baiser rapide.

Ne t’inquiète pas, dis-je. Tout ira bien. 

Va, me dit-elle avec une tape amicale sur l’épaule ». 

A une amie, Colette écrira : «  Il est parti très calme vers je ne sais où, chargé du crime d’être juif, d’avoir fait l’ancienne guerre comme volontaire et d’être médaillé ».

Elle multipliera les initiatives pour faire libérer son mari. Il écrira : «  Elle vit des collaborateurs, des Allemands. Qui l’en blâmera,? J’en eusse, je l’espère, fait autant » (2) 

Le 6 février 1942, Goudeket retrouve la liberté grâce aux interventions de Sacha Guitry, Robert Brasillach et de Suzanne Abetz, l’épouse française de l’ambassadeur d’Allemagne, Otto Abetz.

Le 11 novembre 1942, alors que les Alliés débarquent en Afrique du Nord et que les Allemands occupent tout le pays, Goudeket part se cacher à Salies-de-Béarn puis Saint-Tropez et le Tarn, avant de rentrer à Paris où il restera cloitré dans une chambre de bonne jusqu’à la Libération.

Pour protéger son mari Colette veut le convertir au catholicisme avec l’aide de François Mauriac mais en vain. Dans ses mémoires, Goudeket ne dira pas un mot de l’initiative de sa femme qui le 31 mai 1943 écrit au ministre de l’Intérieur pour tenter de lui obtenir une dérogation au port de l’étoile jaune. (3)

Elle argue qu’à 70 ans, qu'elle ne peut sortir seule en raison d’une arthrite de la hanche : 

«  J’ai l’honneur de solliciter de votre haute bienveillance que mon mari, Maurice Goudeket, Israélite français, né à Paris le 3 août 1889, engagé volontaire 14-18, médaillé militaire, croix de guerre, croix du combattant, blessé cité, soit dispensé du port de l’étoile de Sion ».

Colette mettra en avant sa notoriété en Allemagne : « Je me permets d’ajouter que mes livres et ma personne ont toujours reçu en Allemagne, l’accueil le plus favorable (tournées de conférences à Berlin, Vienne). D’autre part, les autorités occupantes m’ont témoigné ici, chaque fois que l’occasion s’en est présentée, le maximum de courtoisie et de bienveillance. L’an dernier, le Pariser Zeitung me prodiguait des éloges sans restrictions. De son côté, mon mari peut prouver, par de nombreux témoignages, que sa vie civile et militaire, écartée de toute politique, fut toujours vouée à l’honneur, et je sais que les autorités occupantes font cas d’un tel détail.

Je n’hésite pas à me porter, pour l’avenir, garante de mon mari.

Espérant que si dans mon long passé j’ai pu rendre services aux lettres, vous voudrez bien prendre soin de ma demande, je mets ici, Monsieur le ministre, l’expression de mes sentiments de gratitude et de considération ».

Le 19 juin 1943, Joseph Antignac adressa une réponse négative, soulignant que la demande, transmise aux autorités allemandes «  n’a pas été prise en considération et qu’il m’a été répliqué qu’aucune dérogation n’était admise ».


(1) Maurice Goudeket : Près de Colette (Flammarion 1956), p. 180 à 205.

(2) Ibid.

(3) CDJC-CXIII-9 Lettres du 31 mai 1943 et du 19 juin 1943, entre Colette et Joseph Antignac, directeur de cabinet du Commissariat général aux questions juives.





mardi 5 mai 2020

Nicole Barry de Longchamps « sauvée » par Jean Leguay

Nicole Barry de Longchamps ne portait pas d'étoile jaune lorsqu'en juin 1943, elle est arrêtée à Paris. Venant d’Agen, elle n’avait pas non plus d’autorisation de voyage. Serge Klarsfeld, dans son livre « Vichy-Auschwitz 1943 » a évoqué la surprenante médiation de Jean Leguay pour la faire libérer. (1)

Gontran Barry de Longchamps, le mari de Nicole, oncle par alliance de la femme de Leguay, demanda au haut fonctionnaire d’intervenir auprès des autorités allemandes, ce qu’il fera. 

Depuis mai 1942, Leguay était le délégué en zone occupée du secrétaire général de la police, René Bousquet. 


                       En 1957-58, Gontran Barry de Longchamps
           et son épouse Nicole, née Propper (Collection particulière)

Heinz Röthke, le chef du « service juif » de la SS, en charge du camp de Drancy, rapporte dans une note du 11 juin 1943, que la veille, à midi, Jean Leguay, est venu lui demander une faveur toute personnelle, après lui avoir transmis le projet de loi sur la déchéance de la nationalité française des Juifs naturalisés après 1927. 

Röthke précise que Leguay « n’est jusqu’ici jamais intervenu pour des Juifs et qu’il ne veut et ne peut non plus le faire à l’avenir » mais, l’oncle de sa femme «  Barry de Longchamp, originaire d’une bonne famille française, est marié en secondes noces à une Juive, Nicole Barry de Longchamp ». 

Leguay fait remarquer à son interlocuteur qu’il n’est pas parent de « cette Juive. Sa femme non plus au sens propre, étant donné que la Juive n’est en effet qu’une parente par alliance ».

La note ajoute que « Mme Nicole Barry de Longchamp, habite la zone nouvellement occupée. Elle est atteinte de tuberculose et a voulu consulter récemment un spécialiste à Paris ».

« Elle n’a pas porté l’étoile juive et il y a quelques jours, la Juive a été arrêtée par nous et transférée au camp de juifs de Drancy, où elle se trouve encore à l’heure actuelle ».

Röthke rapporte que l’oncle de la femme de Jean Leguay vient voir ce dernier chaque jour afin qu’il entreprenne quelque chose pour sa libération. 

Leguay, qui ne veut pas intervenir en qualité de chef de la police, demande à Röthke s’il peut recevoir M. Barry de Longchamps. Promesse lui est donnée « d’entendre l’oncle cet après-midi ».

Après cette entrevue, Röthke fera suivre la requête à Helmut Knochen, le chef de la Sûreté Sipo-SD, afin que des instructions soient données «  si et quand la Juive, devra le cas échéant être libérée ». (2)

Nicole Barry de Longchamps, sera effectivement libérée grâce à la démarche de son mari et l’intervention de Jean Leguay. Une libération intervenue vers la mi-juin 1943, quelques jours avant que le camp de Drancy soit dirigé par Aloïs Brunner à partir du 18 juin, et son équipe redoutable de sous-officiers SS (Ernst Brückler et Josef Weiszl), qui d'une main de fer, succèdent à Röthke.

Une famille de banquiers


Le château du Gavoy, à Châteaufort (ex Seine-et-Oise), propriété familiale des Barry de Longchamps

Nicole était née Propper en août 1901. Jusque là, la fille du banquier d’origine tchèque Emanuel Propper (1859-1945) et d’Alice Pam (1875-1958) avait pu échapper aux persécutions antisémites grâce à son mariage protecteur avec Gontran Barry de Longchamps. 
Un mariage civil célébré quatre mois avant la déclaration de guerre du 3 septembre 1939, et les Statuts des Juifs des 3 octobre 1940 et 2 juin 1941, instaurés par le régime de Vichy.
Nous sommes le 8 juin 1939 au château du Gavoy à Châteaufort, dans la très riche vallée de Chevreuse, près de Versailles, en Seine-et-Oise. Un cadre idyllique sur sept hectares de cette propriété familiale du XVIIIe.

Nicole a 38 ans, son futur époux en a 57. 
Les témoins de Nicole sont sa grand-mère maternelle Mme Pam, ses cousins Michel et Armand Propper. Ceux de Gontran, le baron Pieyre et le Dr Joseph Landowski. (3)

Le marié est le fils unique d’Ernest Barry, un capitaine commandant du 3e régiment de chasseurs d’Afrique, cantonné à Villers-Cotterêts (Aisne). 

Né à Senlis le 4 mars 1882, Gontran a 10 ans lorsque ses parents divorcent et 17 lorsque son père meurt. 

A 25 ans, il sera adopté par sa tante Claire Martin de Longchamps, deux mois avant son décès. Veuve de Louis Munster (propriétaire des assurances Le Phénix), elle vivait au château de Chevincourt à Saint-Rémy-les-Chevreuse. 
Riche dandy mondain, mécène passionné de sport automobile et aérien, Gontran Barry de Longchamps aida les esprits novateurs de son époque comme l’aviateur Louis Blériot.
Quand la guerre éclate, Gontran protégea tout naturellement Nicole et sa famille juive Propper à « Bagatelle », sa propriété d’Agen, où il jouera au « gentleman farmer » à l’abri des regards des Allemands.

Les Propper comptaient plusieurs banquiers qui réussirent à transférer leurs actifs en Suisse pour échapper aux spoliations. 
Emanuel débuta avec son frère aîné Siegfried, dans les années 1860, à Paris, dans la banque Kohn-Reinach.
Un autre frère d'Emanuel, Edouard-Michel Propper, 65 ans, et sa femme Elisabeth Levylier, 52 ans, réfugiés dans un hôtel à Cannes, seront arrêtés par la police allemande avec d’autres familles juives, le 30 janvier 1944 à Beauvezer, un petit village perché dans les Alpes de Haute-Provence, où ils étaient assignés à résidence. Ils seront déportés sans retour à Auschwitz le 10 février 1944 par le convoi n°68. 
La soeur cadette de Nicole, Jacqueline (1917-2014), échappa aux persécutions, en se réfugiant très tôt en Angleterre. 
Elle a été mariée à Wladimir Porché (1910-1984) qui dirigea les programmes de la Radiodiffusion française de 1937 à 1939. Il deviendra directeur général en 1946, puis de 1949 à 1957, directeur général de Radio Diffusion Télévision française, avec le soutien de François Mitterrand, ministre de l'Intérieur en 1954-55, et de Gaston Defferre (à l'Outre-Mer en 1956-57).

Antoinette Nénot sa première épouse

Les épreuves de la vie n’ont pas épargné Gontran Barry de Longchamps. 
Veuf à 41 ans, il s’était marié en première noce en 1907 avec Antoinette-Olinde Nénot (1887-1923), qui meurt à 35 ans.
C'est d'ailleurs grâce aux Nénot, amis des Propper, leur banquier, que Gontran Barry de Longchamps rencontrera Nicole.

Antoinette Nénot était l’une des quatre filles d’Isabelle Mathias (1865-1939) et de l’architecte Henri-Paul Nénot (1853-1934), grand prix de Rome 1877, architecte de la Sorbonne et du palais de la Société des Nations à Genève. 
La soeur jumelle d’Antoinette, Geneviève, mourra en couches à 24 ans en 1911. Elle  avait épousé en 1907 le sculpteur Paul Landowski (1875-1961), ancien directeur de l’école des Beaux-Arts de Paris. 
Proche d’Otto Abetz, l’ambassadeur d’Allemagne à Paris pendant la Seconde Guerre mondiale, il fera avec d’autres artistes « le voyage à Berlin » en novembre 1941, ce qui lui vaudra un procès au moment de l’épuration, d’où il ressortira sans condamnation.
La cadette des soeurs Nénot, Marie-Thérèse, née en 1891, épousa en 1910 Pierre Janin (1883-1914), un fils de notable de Saint-Rémy-les-Chevreuse, propriétaire du château de Saint-Paul, et vice-président du conseil général de Seine-et-Oise. Leur fille Christine Janin épousa Jean Leguay en 1935.
Gontran Barry de Longchamps, oncle de Christine, connaissait donc Leguay avant-guerre. 

Les origines juives de l'épouse de Leguay


Christine Janin avait aussi des origines maternelles juives. 
Une filiation que Leguay ne pouvait ignorer et qui a peut être influé sur sa médiation de sauvetage en faveur de l’épouse de Gontran Barry de Longchamps. L'hypothèse mérite d'être lancée.
Christine Janin était en effet la fille de Pierre Janin (1883-1914) et de Marie-Thérèse Nénot, née en 1891, fille cadette de Henri-Paul Nénot (1853-1934) et de Isabelle Mathias (1865-1939). 
Sa grand-mère maternelle était la fille de Fernand Mathias (1814-1890), directeur des Chemins de fer du Nord, et de Claire-Eugénie Rodrigues (1831-1903), fille de Benjamin Olinde Rodrigues (1795-1851).  
Mathématicien, financier et économiste, son père, Isaac Rodrigues-Henriques était un banquier juif séfarade de Bordeaux qui participa activement avec ses cousins, les frères Pereire,  à la création des chemins de fer en France.

De sa première union, Gontran Barry de Longchamps aura trois enfants : une fille, Jacqueline (1908-2010) qui épousa l’illustrateur-graveur Hervé Baille (1896-1974) - connu pour avoir réalisé des publicités de la Vache qui rit et d'Air France, il dessina aussi pour le Secours National de Pétain - et deux garçons, Philippe (1910-2000) et Jacques (1911-2010) qui sera adopté par Nicole. 
Le fils de Jacques, François Barry Delongchamps, ancien ambassadeur de France, apporte son témoignage sur la personnalité de Nicole qu'il considère en quelque sorte comme sa « belle grand-mère » :
« Après quelques jours dans le camp, elle obtiendra effectivement sa libération grâce à Jean Leguay, collaborateur notoire. J’ignore comment cette grande bourgeoise, élevée jusqu’à 13 ans par une préceptrice allemande, qui habitait boulevard Saint-Germain à Paris, a vécu ce passage éprouvant à Drancy. 
Cette forte personnalité était aussi une femme de caractère : à Châteaufort, où elle vivait avec mon grand-père, elle ira jusqu’à faire modifier le découpage administratif pour que cette commune de l’ex-Seine-et-Oise, rattachée en 1964 au nouveau département de l’Essonne, reste dans les Yvelines. Elle obtiendra d’ailleurs satisfaction en 1969. 
Nicole n’avait aucun état d’âme sur l’intervention de Leguay. 
Dans la famille de ma mère, un autre « collabo » interviendra en faveur de son demi-frère Bernard Dreyfus (1911-1990).
Atteint de poliomyélite, il sera libéré de Drancy, et deviendra un professeur de médecine réputé à l’hôpital Henri-Mondor mais il n’a jamais digéré d’avoir été libéré grâce à Jean Luchaire. »
Jean Luchaire, journaliste collaborationniste, fondateur des « Nouveaux Temps », ami de l’ambassadeur Otto Abetz, fuira en août 1944 à Sigmaringen où Pétain avait été fait prisonnier des Allemands. Condamné à mort, il sera fusillé le 22 février 1946 pour intelligence avec l'ennemi.

Gontran Barry de Longchamps est décédé le 10 septembre 1959 à l’âge de 77 ans. Nicole disparaît en 1992, à 91 ans. Bien qu'il n'y ait pas trace de sa conversion au catholicisme, ses obsèques seront célébrés dans l'église de Châteaufort. Les deux époux reposent au cimetière du village.

Thierry Noël-Guitelman


(1) « Vichy-Auschwitz 1943 », (Fayard, 1983) pages 285-286.
(2) CDJC-XXVII-13 Note du 11 juin 1943 du service IV B de la Sipo-SD France à Paris, adressée au SS-Standartenführer Helmut Knochen, accompagnée d’une note manuscrite, non datée, au sujet d’une visite de Jean Leguay.
(3) Le carnet du « Figaro » (12 juin 1939)


Leguay - Bousquet : un parcours complice

Jean Leguay, le « sauveur » de Nicole Barry de Longchamps, a vécu sa carrière de haut fonctionnaire dans l’ombre de celle de René Bousquet.
Les deux hommes qui sont nés la même année, en 1909, auront un parcours complice. Co-responsables de la mort de milliers de juifs, ils mèneront après-guerre de brillantes carrières dans le privé…

Leguay, né le 29 novembre 1909 à Chevreuse, était le fils du président de la chambre des notaires de Rambouillet. Ancien élève des lycées Montaigne et Louis-le-Grand, diplômé de Sciences Po, docteur en droit et avocat, il débuta sa carrière dans la préfectorale en 1932. 
Le 3 octobre 1935, alors qu’il est secrétaire général des Basses-Alpes, il épouse Christine Janin, fille de Marie-Thérèse Nénot (la soeur d’Antoinette Nénot, première épouse de Gontran Barry de Longchamps).
En 1936, il devient sous-préfet de Haute-Savoie. En juin 1939, il est nommé sous-préfet de Vitry-le-François (Marne), poste occupé depuis avril 1938 par René Bousquet, nommé secrétaire général à la préfecture de Châlons-sur-Marne, avec le soutien d’Albert Sarraut, ministre de l’Intérieur, frère de Maurice Sarraut, sénateur radical-socialiste de l’Aude et propriétaire de La Dépêche de Toulouse.
Du 16 novembre 1940, au 1er janvier 1942, Leguay lui succède au secrétariat général, Bousquet étant devenu préfet de la Marne, le plus jeune de France à 31 ans. 
Bousquet, né le 11 mai 1909 à Montauban, est aussi fils de notaire.
Diplômé de la faculté de droit de Toulouse, il débuta comme chef de cabinet du préfet de Tarn-et-Garonne. A 22 ans, en 1931, il devient chef de cabinet adjoint du sous-secrétariat d’Etat à l’Intérieur dans le premier gouvernement Laval. Sous le Front Populaire de 1936, il est chargé du fichier central de la Sûreté nationale.

Fin 1941, Leguay devient directeur de cabinet du préfet délégué en territoires occupés. 
En avril 1942,  lorsque Pierre Laval nomme Bousquet au secrétariat général à la Police, Leguay devient son délégué à Paris dans les territoires occupés et il est promu préfet hors cadre. Des rôles de premier plan pour la collaboration policière de Vichy avec l’occupant allemand.
Début juillet, Leguay participe avec Dannecker, chargé de la Question Juive à la Gestapo de Paris, à la commission préparatoire à la rafle du Vél d’Hiv. 

La déportation des enfants

Alors que Laval proposait dans un premier temps que les enfants de moins de 16 ans accompagnent leurs parents « lors de l’évacuation des familles juives de la zone non-occupée », le chef du gouvernement accepte finalement que les juifs de zone occupée et de zone libre, enfants compris, soient livrés…
Le 15 juillet 1942, Bousquet, sous l’autorité de Darquier de Pellepoix, Commissaire Général aux Questions Juives, donne officiellement l’ordre d’arrêter les juifs apatrides de région parisienne. 
Les 16 et 17 juillet, lors de la rafle du Vél d’Hiv, près de 3000 policiers français arrêtent 13.152 juifs à Paris et banlieue.
Le 17 juillet, lors d’une réunion consacrée aux enfants arrêtés, Jean Leguay plaide « avec insistance » le principe de leur déportation, et leur transfert dans les camps de Pithiviers et Beaune-la-Rolande. Plus de 800 enfants de moins de 6 ans seront finalement déportés dix à quinze jours après leurs parents…
Le 18 août Bousquet abaisse de 5 à 2 ans l’âge d’arrestation des enfants juifs en zone sud. 
Fin 1943, Pétain révoquera Bousquet et Leguay. En 20 mois à la tête de la police, ils auront participé à la déportation de 60.000 personnes de confession juive.
Préfet de l’Orne depuis janvier 1944, Leguay sera suspendu à la Libération et révoqué en 1945.
Il poursuivra une carrière dans le privé aux Etats-Unis. D’abord pour le groupement professionnel des industries d’art et de création, puis de 1950 à 1957 comme vice-président de la distribution des parfums Nina Ricci. Sa révocation sera annulée en 1955, et il sera réintégré dans le corps préfectoral en 1957.
De 1958 à 1970 il sera directeur général du groupe Warner-Lambert Co, un conglomérat industriel pharmaceutique dont il deviendra président international jusqu’en 1974. En 1975, il prend sa retraite après avoir présidé les laboratoires Substantia à Suresnes. 
Inculpé de crimes contre l’humanité en 1979 pour son rôle dans l’organisation de la rafle du Vél d’Hiv les 16 et 17 juillet 1942, il meurt avant l’ouverture d’un procès le 2 juillet 1989. 

Quant à René Bousquet, il comparaîtra en 1949 devant la Haute-Cour mais sera acquitté, à l’issue d’un procès expédié en trois jours. 
Ecarté de la fonction publique il réussira à faire une brillante carrière d’homme d’affaires sans avoir à s’exiler à l’étranger. On le retrouve à la Banque d’Indochine, et au conseil d’administration du quotidien La Dépêche du Midi, qu’il dirige aux côtés de la veuve de Jean Baylet, décédé en 1959. 
Une décision du Conseil d’Etat lui permet en 1957, de retrouver sa Légion d’Honneur. Il est amnistié en 1958. Ami de François Mitterrand depuis le début des années 50, il sera même candidat de l’UDSR (Union démocratique et socialiste de la Résistance) aux élections législatives dans la Marne. 
Jusqu’en 1978, il siège au conseil d’administration d’UTA, compagnie aérienne dirigée par Antoine Veil, qui obtiendra sa démission.

En 1986, une instruction judiciaire est lancée contre Bousquet mais François Mitterrand, devenu Président de la République, interviendra pour ralentir la procédure. 
La Cour de cassation tranche en faveur d’un procès en cour d’assises, suite à l’acquittement de 1949, les partisans d’un nouveau procès invoquant une nouvelle infraction pénale, le crime contre l’humanité.
En 1989, une plainte en ce sens est déposée par trois associations suite à la déportation de 194 enfants.
Bousquet sera inculpé en 1991 mais l’instruction sera close et il n’y aura jamais de procès car le 8 juin 1993, Bousquet est assassiné à son domicile par Christian Didier qui, condamné à dix ans de prison, sera libéré en 2000.

                                                                                                                                          T. N-G





dimanche 23 février 2020

"Le Dernier métro" de François Truffaut : le premier record des César

"Le Dernier métro" de François Truffaut a obtenu dix César en 1981. Jusqu'au Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau en 1991, il était le film le plus primé. Retour sur ce récit doublement autobiographique vécu pendant l'Occupation par la scénariste Suzanne Schiffman et la danseuse Margaret Kelly.


Suzanne Schiffman doit sa notoriété aux cinéastes de la Nouvelle Vague du cinéma français.
Née Suzanne Klochendler, le 27 septembre 1929, et décédée à 71 ans, le 6 juin 2001, elle effectua des études de lettres à la Sorbonne, puis rejoindra Edgar Morin au CNRS, avant de devenir assistante de Jacques Rivette sur le tournage de "Paris nous appartient" en 1958.
Avec "Tirez sur le pianiste" (1960) elle devient la scripte de François Truffaut.
La même année, Jean-Luc Godard fait appel à ses compétences pour "Une femme est une femme".
Elle enchaîne avec "Le Mépris" (1963), "Pierrot le fou" (1965) et "Week-end" (1967).
François Truffaut lui permettra d'exprimer la plénitude de son talent depuis "Baisers volés" (1968) jusqu'à son dernier film "Vivement dimanche !" (1983).
En 1974, elle sera co-scénariste de "La Nuit américaine" avec Jean-Pierre Léaud et Jacqueline Bisset.
En 1975, elle remporte le prix du meilleur scénario au New York Films Critics Circle Awards pour "Histoire d'Adèle H", autre film majeur de Truffaut, avec Isabelle Adjani.
La profession la reconnaît vraiment en lui décernant le César du meilleur scénario, en 1981, pour "Le Dernier métro", réalisé en 1980 par Truffaut, aux côtés de Jean-Claude Grumberg.
Ce film restera le plus récompensé du cinéma français avec pas moins de dix César, jusqu'en 1991 où le "Cyrano de Bergerac" de Jean-Paul Rappeneau, obtiendra aussi dix César. Ces performances n'ont pas été dépassées depuis.
César du meilleur film, du meilleur réalisateur, du meilleur scénario, du meilleur acteur (Gérard Depardieu), de la meilleure actrice (Catherine Deneuve), du meilleur montage (Martine Barraqué-Currie), de la meilleure musique (Georges Delerue), du meilleur son (Michel Laurent), du meilleur décor (Jean-Pierre Kohut-Svelko) et de la meilleure photo (Nestor Almendros).
Au total, douze nominations avec les deux seconds rôles oubliés d'Andréa Ferréol et Heinz Bennent et des interprètes excellents comme Richard Bohringer en officier de la Gestapo, Paulette Dubost, Maurice Risch, Sabine Haudepin...
Le "Dernier Métro" connaîtra un très gros succès avec près de 3.400.000 entrées en France et pas moins de dix semaines de programmation à Paris et plus de 706.000 entrées.

L'étoile jaune cachée
par un foulard...

Dans "Le Dernier métro", Suzanne Schiffman a introduit des éléments biographiques vécus pendant l'Occupation, comme lorsque la jeune juive cache son étoile jaune derrière un foulard pour aller aux spectacles.
Son père, juif polonais, vivait caché dans un grenier comme le père de Rosette Goldstern, et Lucas Steiner, le mari de Marion (Deneuve), qui assure la direction du théâtre Montmartre à la place de son mari... juif.
Chaque soir elle lui rend visite et lui parle des prestations des comédiens, notamment du jeune premier Bernard Granger (Depardieu), dont elle est tombée amoureuse.
Lors de la générale, la troupe subit les menaces du critique de "Je suis partout" qui ambitionne de diriger la Comédie Française. La Gestapo décide une perquisition au théâtre mais Granger, qui est aussi dans la résistance, aidera Lucas à s'échapper...

La vie de Margaret Kelly
et de Marcel Leibovici

Margaret Kelly cacha son mari
jusqu'à la Libération de Paris
La véritable héroïne du film est aussi très largement inspirée par la vie de Margaret Kelly (1910-2004) et de son mari Marcel Leibovici (1904-1961).
Cette danseuse irlandaise est surtout connue sous le nom de Miss Bluebell pour avoir fondé la revue des Bluebell Girls au Lido de Paris.
Leibovici, juif roumain, pianiste et compositeur aux Folies Bergères, arrêté en 1942, sera interné au camp de Gurs où la Résistance aidera à le faire évader.
Il rejoindra Paris où sa femme le cachera en face de la Préfecture de Police jusqu'à la Libération. Interrogée par la Gestapo, elle ne craquera pas.
Le personnage de Jean-Loup Cottins, joué par Jean Poiret, rappelle les déboires de Sacha Guitry arrêté à la Libération. Et la scène où Gérard Depardieu s'en prend au critique de "Je suis partout" est tirée des faits qui opposèrent Jean Marais à Alain Laubreaux, journaliste qui sera condamné à mort par contumace en 1947 pour collaboration.
"Le Dernier Métro" est également inspiré par "Carola", une pièce de théâtre de Jean Renoir, adaptée en 1973 pour la télévision américaine avec Leslie Caron.

Près de 40 ans après "Le Dernier Métro", le nom de Suzanne Schiffman reste très présent dans le cinéma français : son fils ainé Mathieu Schiffman est acteur et assistant réalisateur.
Son deuxième fils, Guillaume Schiffman, est directeur photo. Il est le père, avec la réalisatrice Emmanuelle Bercot, de Némo Schiffman, acteur et chanteur.
Le frère de Suzanne, Michel Klochendler, né en 1957, est monteur et a travaillé pour Truffaut, Pialat, Rivette, Téchiné.

T.N.

Pour en savoir plus : deux ou trois choses que vous ne saviez (peut-être pas) sur "Le Dernier métro"

https://data.bnf.fr/12886729/suzanne_schiffman/