samedi 31 juillet 2021

LA FAMILLE GUITELMAN DANS LE 18e ARRONDISSEMENT DE PARIS

Nouchem et Sima Guitelman
Nouchem Guitelman, tailleur de profession, est né en 1878 à Iampol, aujourd'hui petite ville d'Ukraine, sur les rives du Dniestr, face à l’actuelle Moldavie. Il est le fils de Lazare Guitelman et de Schenola Scherman. 

Son épouse Sima Abramovitch, est née en 1872 à Odessa - alors dans l'Empire Russe aujourd’hui en Ukraine -. 

En septembre 1904, après avoir vécu le pogrom antisémite de Kichinev du 6 février 1903, où ils habitaient, ils décidèrent comme des centaines de milliers de juifs de prendre la route de l’exil, fuyant la Russie tsariste, pour vivre enfin une vie sans pogrom.

Nouchem, 26 ans, et Sima, 28 ans, ne prendront pas la direction de la Palestine mais de la Turquie, pays de l’empire Ottoman, plus proche, de l'autre côté de la Mer Noire, depuis Simferopol, en Crimée.

Iampol se trouve dans l'actuelle Ukraine
Deux filles naîtront à Constantinople : Bella-Frida, le 22 mai 1908 et Caroline-Suzanne, le 18 mars 1910. 
Mais en 1913, dans le climat des guerres balkaniques et peu après le coup d’état des Jeunes-Turcs, où le nationalisme s’exprime au détriment des minorités, la famille viendra se réfugier en France.

Après un long périple, ils débarquent à Marseille, puis à Paris en septembre 1913, dans le 18e arrondissement. 

Ils habiteront d’abord au 1, rue Bachelet, puis, en 1920, au 22, rue Leibnitz, et, finalement, au 7, rue de Trétaigne. 

La famille s’agrandira avec la naissance d’Ida, le 7 septembre 1915, puis de Jeannette, le 11 juin 1920. Un garçon, Maurice, naîtra le 23 juillet 1923. 

Les Guitelman vivaient dans un appartement de trois pièces, sans salle de bains, au 4e étage du 7 rue de Trétaigne. Cet immeuble HBM (Habitation à bon marché) inauguré en juin 1904 par le ministre du Commerce Georges Trouillot, est l’oeuvre des architectes Henri Sauvage et Charles Sarazin, pour le compte de la Société des logements hygiéniques à bon marché. 
Sa secrétaire gérante, Mme Emmeline Weil-Raynal, était une des fondatrices de l’Education sociale de Montmartre, de l’université populaire du 18ème arrondissement et membre du comité de rédaction et du conseil d’administration du journal « La vie socialiste ». 
Déportée à Auschwitz le 10 février 1944 (convoi n° 68), elle y meurt le 15 février de la même année. Après avoir été le siège de la section locale de la S.F.I.O. puis du Parti socialiste, l’immeuble a été classé monument historique en 1986. 

Naturalisés en 1927

En 1927, Nouchem et Sima Guitelman sont naturalisés français par décret du président de la République Gaston Doumergue et Louis Barthou, ministre de la Justice, après avoir effectué leur demande deux ans plus tôt le 9 décembre 1925. 

Les époux Guitelman déposeront cette demande à la Justice de Paix du 18ème arrondissement, accompagnés par deux témoins : Salomon Maïer, tailleur, âgé de 38 ans, domicilié au 52, rue Ordener, à Paris 18ème, et, par Jules Denessa, retraité des chemins de fer, âgé de 60 ans, domicilié au 15, rue Caillié, à Paris 18ème. 

La famille parle le Yiddish mais ne pratique pas la religion juive. 

Tout au plus ils respectent les fêtes et traditions. Sima survit grâce aux « shmatès » et à la brocante. Nouchem est tailleur à domicile, spécialisé dans la boutonnière.  

Frida et Caroline se marient à des juifs de Pologne et deviennent Mesdames Lajzerowicz et Urmann. 

Ida et Jeannette vont à l’école publique, fréquentent la Maison Verte, et ne parlent que le français. Elles se marieront à des « goys ». 

Jeannette qui travaille aux Galeries Lafayette, tombe amoureuse d’André Noël, un jeune magasinier de 17 ans, né en janvier 1919. 

A 20 ans, André est mobilisé le 15 octobre. Il part au front du 15 novembre 1939 au 25 juin 1940, à Abbeville, Amiens et Beauvais. A partir du 14 juin 1940, au début de l’occupation nazie de Paris, Jeannette et son jeune frère Maurice sont confiés par André à ses parents, Pierre et Charlotte Noël. Cet industriel, fabriquant de stylos avec plume en or de la marque Edacoto, a la chance d’avoir une résidence secondaire à Saint-Pierre-les-Nemours, en Seine-et-Marne. Quand les allemands franchissent la Seine près de Fontainebleau, la famille se replie près du Mans dans la Sarthe avec leurs voisins de Nemours, M. et Mme Riasse. En franchissant les barrages, M. Riasse est présenté comme le jardinier de Pierre Noël et Jeannette comme sa secrétaire, une "jeune alsacienne" réfugiée suite à l’invasion allemande… 

Dès l’armistice signée le 22 juin 1940, les Noël, Jeannette et Maurice, rentrent à Paris. Du 26 août jusqu’au 12 septembre 1940, Jeannette est vendeuse au rayon cravates des Galeries Lafayette. Affectée momentanément au magasin de Limoges, Jeannette y séjournera avec ses soeurs Suzanne et Frida. 

Revenue à Paris, Jeannette sera affectée, à partir du 13 septembre 1940, dans les bureaux comme sténo-dactylo, sans contact avec le public. Jeannette Guitelman et André Noël se marieront le 1er mars 1941 à la mairie du 18e. Revenu à la vie civile, André a créé, un mois plus tôt, son atelier de réparation de stylos chez ses parents à Colombes. 

A partir d’août, il transfert son atelier au 37, rue Joseph de Maistre où vit le jeune couple. En raison de l’aryanisation des biens juifs (loi française du 22 juillet 1941), Jeannette doit quitter les Galeries Lafayette, le 31 juillet 1941. 

Stratégies de survie

Les arrestations et les déportations se multipliant à partir de 1942, la famille Guitelman se retrouve confrontée à de multiples dangers. 

Chacun doit se « débrouiller » et adopter diverses stratégies de survie. Au cours de l’été 1942, Maurice qui travaillait encore chez Chausson à Gennevilliers, dissimulait son étoile jaune (ordonnance allemande du 29 mai 1942 instaurant le port obligatoire de l’étoile jaune pour les Juifs de plus de 6 ans). Jeannette, Maurice et ses parents feront des allers-retours à Saint-Pierre-les-Nemours où le voisinage restera solidaire. 

Le 27 octobre 1942, Emile Seurat, gardien de la paix à la Préfecture de Police de Paris, envoie une demande d’exemption du port de l’étoile jaune pour sa femme Ida, au commandant du « Service juif allemand », 31 bis, avenue Foch, à Paris. 

Pour appuyer sa demande, il ajoute un courrier de recommandation du 30 octobre 1942 de son chef Emile Hennequin, le directeur de la police municipale, qui sera très impliqué dans l’organisation de la rafle du Vel d’Hiv de juillet 1942. Ida ne pratique pas la religion et leur fils Jean-Pierre, baptisé catholique, fréquente une école chrétienne. S’agissant d’un mariage mixte, la demande est en théorie recevable compte tenu des dérogations possibles. Le 4 novembre 1942, Ida obtient sa dérogation valable jusqu’au 31 janvier 1943, prolongée jusqu’au 30 avril 1943. 

En février 1943, le frère aîné de Sima, Nathan Abramovitch, 74 ans, qui vit aussi à Paris, est raflé avec son épouse. Ils seront déportés à Auschwitz par le convoi n° 49 du 2 mars 1943, avec mille personnes dont 33 enfants. 

En mai 1943, les enfants de Caroline-Suzanne et de Frida, Michel Urmann et Jeannine Lajzerowicz, seront cachés jusqu’à la Libération, au château de Cappy à Verberie, dans l’Oise. Ils fréquentaient le patronage de la Maison Verte dirigée par le pasteur Jousselin, au 127-129 de la rue Marcadet. 

Jousselin fut le créateur en mai 1943 du Comité Protestant des Colonies de Vacances (CPCV). En 1980, il sera fait Juste devant les Nations par Israël. 

Le 12 mai 1943, Ida sera arrêtée à son domicile au 7, rue de Trétaigne, à 6 heures du matin. Son mari, Emile, fera appel à son collègue Alfred Jurgens, pour la faire libérer quelques heures plus tard. Cet alsacien, interprète d’allemand, détaché aux affaires juives de la Gestapo, travaille au sein d’une brigade d’élite redoutable, créditée de 5 000 arrestations de Juifs. Il remettra à Emile Seurat les fiches de recensement de toute la famille Guitelman. Ce geste les rendra désormais invisibles aux yeux des autorités d’occupation. Pierre Noël reconduira les grands-parents Guitelman à Saint-Pierre-les-Nemours où ils resteront jusqu’à la Libération. 

Un jour, Sima Guitelman se trouva nez-à-nez avec un officier allemand. Elle ne se démonta pas : « C’est mon maison ! » lança-t-elle avec un fort accent… 

Maurice et sa soeur Jeannette les rejoindront. 

Enceinte à partir de novembre 1943, elle y accouchera de Gérard Noël le 6 juillet 1944. 

A la Libération, Jurgens sera traduit devant la Cour de justice. On l’accusa de 300 arrestations. Il reconnaîtra seulement « les arrestations de juifs trafiquants avec la Gestapo ». Révoqué sans pension à la Libération, son dossier sera classé par le Parquet. Amnistié en 1953, il sera réintégré en 1954. Nommé officier adjoint en 1963, il pourra prendre sa retraite à 55 ans, en 1969. Il meurt à 74 ans, en 1993. 

Emile Seurat, qui comptait dans les rangs de la Résistance depuis le début de l’année 1941 au sein du réseau Camouflage de matériel de guerre de l’armée (CDM), assurait des liaisons de renseignement. Il fournira des faux papiers, aidera des familles juives à passer en zone « libre ». 

Dénoncé début 1943, il ira se cacher avec Ida et leur fils à Champigny-sur-Marne puis, à nouveau repérés, à Saint-Fargeau (Yonne), dans la famille d’Emile. En août 1944, il ne participa pas à la Libération de Paris. Il préféra être à Lyon pour participer au sauvetage de son frère et d’autres résistants qui ont été arrêtés. 

Médaillé de la Résistance en 1948, officier de la Légion d’Honneur, il décède en 1997, à l’âge de 90 ans. 

Nouchem Guitelman est décédé en 1957, chez lui au 7, rue Trétaigne, tout comme son épouse Sima, en 1976, à près de 104 ans. 

Ils sont enterrés au cimetière de Pantin avec leur fils Maurice dans la sépulture juive de la 34ème division. Maurice avait été mécanicien chez Renault puis commerçant non sédentaire. Les époux Guitelman étaient adhérents de l’Association Consistoriale Israélite de Paris et de la Société des Secours Mutuels d’Israélites-Amicale d’Odessa, fondée en 1914, qui se chargea de leurs obsèques. 

Jeannette Guitelman est décédée à 60 ans, le 29 avril 1981 à Dreux (Eure-et-Loir). Son époux, André Noël, à 70 ans, en avril 1989 dans la même ville. 

Caroline-Suzanne Guitelman, épouse Urmann, qui fut secrétaire à la Standard Oil (ESSO), habitait au 1 rue Ferdinand-Flocon, jusqu’à son décès en 1995 à 85 ans. Frida Guitelman, épouse Lajzerowicz, puis Keledjian, est décédée à près de 100 ans à la maison de retraite de Longjumeau (91). 

Maurice Guitelman est décédé le 20 mai 2005, à 82 ans. Il a rejoint ses parents au cimetière de Pantin.

Ida Guitelman est décédée le 25 avril 2019, à 103 ans à Meudon (92). Elle a été inhumée le 2 mai 2019 au cimetière des Longs-Réages (division C, section O, tombe 532) de Meudon, 29 avenue de la Paix. Elle repose aux côtés de son mari, Émile, né le 6 novembre 1907 à Boulogne-sur-Mer, décédé le 2 juillet 1997.












Récit rédigé par Thierry Noël-Guitelman, fils de Jeannette Guitelman, pour M. Patrice Markiewicz (mars 2020). 

mercredi 7 juillet 2021

Annette Wieviorka invitée de l'université d'été du Mémorial de la Shoah à Toulouse

La Shoah... Toujours confrontée aux négationnistes, aux prêches antisémites, aux fake news véhiculées par les réseaux sociaux. Dans ce contexte, pas simple d’enseigner l’histoire et de transmettre des valeurs universelles. Un véritable défi relevé par l’université d’été du Mémorial de la Shoah pour apporter des réponses à des enseignants des académies de Toulouse, Bordeaux et Montpellier. Des enseignants parfois désemparés et contestés dans leur enseignement, venus chercher comment aborder le sujet devant leurs classes...


L’historienne Annette Wieviorka était l’invitée de l’université d'été du Mémorial de la Shoah, réunie à Toulouse du 5 au 9 juillet 2021. 

Dans une conférence sur le thème « Transmettre l’histoire de la Shoah aujourd’hui », elle répondait aux questions de Léa Veinstein, commissaire de l’exposition « La voix des témoins », visible jusqu’au 29 août au Mémorial de la Shoah à Paris. 


Annette Wieviorka. Malgré la disparition des derniers
survivants de la Shoah, l'historienne n'est pas inquiète
pour l'avenir de la transmission aux jeunes générations (dr)
Annette Wieviorka n’a pas toujours enseigné l’histoire. Son parcours est pavé de ruptures et de doutes : « En 1968, avec ma licence de lettres j'ai débuté comme maître auxiliaire de français au lycée d'Ermont (Val d'Oise). Ma conversion à l’histoire s’est faite quand je militais avec un petit groupe maoïste devant les usines de Renault Billancourt. Je revivais les photos du Front Populaire et l’on aspirait, comme l’on dirait aujourd’hui, à la convergence des luttes. Mais les ouvriers n’ont pas voulu de notre drapeau rouge ! 

Je suis sortie de 1968 avec une certaine difficulté et j’ai passé mes certificats d’histoire en suivant des cours du soir. 

Entre 1974 et 1976, j’avais eu l’opportunité d’aller enseigner le français à Canton (Ndlr : où elle part avec son mari, également enseignant de français, et son jeune fils Nicolas, alors âgé de trois ans). A mon retour de Chine, j’ai eu mon premier poste de prof d’histoire. » (Ndlr : au lycée Jules-Siegfried à Paris 10e)

En rompant avec le maoïsme, Annette Wieviorka a aussi connu le doute, comme l’expliquait Edgar Morin à propos du communisme, dans son livre « Autocritique » (Ndlr : paru en 1959)

« Cela a entraîné un grand vide et j’ai cherché ce qui m’avait conduit à cet engagement, né de l’immigration et de la Shoah. »

Après sa fascination pour la Chine communiste et totalitaire, une certaine culpabilité s’est emparée de l’ex-militante laïque, qui, voulant réparer son erreur, se lança dans la recherche historique.

A cause du vide laissé par l’absence de ses grands-parents, à une époque où l’on ne voulait pas entendre parler de la Shoah, Annette Wieviorka décida de partir à la recherche de ses racines : « J’ai commencé à apprendre le yiddish, et me suis plongée dans les écrits de mon grand-père, journaliste. Je suis partie en stage à New York où je suis tombée sur un livre-souvenir consacré à Żyrardów, sa ville natale, du nom de Philippe de Girard, un ingénieur français inventeur des machines à filer le lin. C’est cette histoire collective qui m’intéressait alors plutôt que mon histoire familiale. »


"Il y avait du mépris

pour les témoignages" 


A la différence de nombre d’historiens de sa génération, attachés aux seuls documents, Annette Wieviorka s’est intéressée aux témoignages : « J’ai toujours voulu parler et l’on ne voulait pas nous entendre, expliquait Simone Veil que j’ai interviewée sur son retour de déportation. Un tiers de ma thèse est consacrée aux premiers témoignages écrits. Il y avait du mépris pour les témoignages qui, évidemment, ne peuvent pas être la seule source quand on veut écrire l’Histoire. Le témoin n’est pas forcément fiable et sa mémoire est travaillée par ce qu’il a vécu après. 

Avec le procès Eichmann, on a vu pour la première fois l’accusation se baser non sur des documents mais sur les témoignages. Ce sera l’avènement du témoin. Jusqu’alors, les historiens ne s’intéressaient pas à cela. 

C’est venu aussi dans la foulée du feuilleton américain Holocauste, en 1978 où les survivants ne reconnaissaient pas leur histoire. Avec l’université de Yale, j’ai participé en 2002 aux « 14 récits d’Auschwitz », une série documentaire, réalisée avec Caroline Roulet, et le survivant Henri Borlant, dans le cadre du programme Fortunoff Video Archive for Holocaust Testimonies. Suivront en 2007, les Témoignages pour mémoire, un documentaire de Claudine Drame. »

Confronté à la disparition des témoins, l’historien et les enseignants ne sont-ils pas privés de cette ressource si utile pour la transmission du message auprès des jeunes générations ?

« Le temps passe et le monde change. Avec les survivants, on était dans le même monde, celui de nos contemporains. Dans l’avenir, les enseignants ne manqueront pas d’outils. Je n’ai pas d’inquétude. »


Thierry Noël-Guitelman



Repères


> Originaires de Pologne, les grands-parents paternels d’Annette Wieviorka ont été arrêtés à Nice et seront déportés vers Drancy et Auschwitz par le convoi n°61 du 28 octobre 1943. 

Son père avec son oncle, réfugiés en Suisse, et sa mère à Grenoble, ont pu échapper au pire qui emporta le reste de la famille.


> Née en 1948, Annette Wieviorka est agrégée d’histoire. 

Elle obtient son doctorat en 1991, et soutient sa thèse à l’université de Paris-Nanterre, sous la direction d’Annie Kriegel : « Déportation et génocide : entre la mémoire et l’oubli 1943-1948, le cas des juifs en France ».


> Auteur de plus d’une quinzaine d’ouvrages, voici quelques titres à retenir : Le procès Eichmann (Complexe, 1989) L’Ère du témoin (Plon, 1998), Auschwitz expliqué à ma fille (Seuil, 1999), Auschwitz, 60 ans après (Laffont, 2005), A l’intérieur du camp de Drancy (Perrin, 2012) avec Michel Laffitte, 1945 La découverte (Seuil, 2015).

Dans son dernier livre Mes années chinoises (Stock, 2021), elle revient sur son engagement maoïste, partagé avec son mari Roland Trotignon.


> Directrice de recherche émérite au CNRS, elle a été membre de la mission Mattéoli, sur la spoliation des biens des Juifs de France, créée en 1997, qui rendit ses conclusions en 2000 : les confiscations seront évaluées à 1,35 milliard d’euros et les spoliations financières à 520 M€. 

L’argent confisqué aux juifs à Drancy, antichambre de la mort, a été transféré en juillet 1944 à la Caisse des dépôts et consignations et il restait 12,8 millions de francs. Cette somme a bien été transférée au Trésor Public mais les ministres des Finances de la IVe République ont « oublié » cet argent, tout comme les bijoux et objets de valeurs déposés à la Banque de France… Un scandale dénoncé par Serge Klarsfeld en 1994.

Quant aux 100.000 œuvres d’art spoliées, seulement 45.000 ont été restituées à leurs propriétaires ou ayants-droits.

Le 16 juillet 1995 : Jacques Chirac, président de la République, lors du 53e anniversaire de la rafle du Val d’Hiv, reconnaîtra la responsabilité de l’État français dans la déportation et l’extermination des juifs durant la Seconde guerre mondiale.


> Création en 2000 de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, présidée jusqu’en 2007 par Simone Veil. 

La Fondation subventionne notamment près des deux tiers du budget du Mémorial de la Shoah et a soutenu depuis sa création près de 5000 projets liés à la lutte contre l’antisémitisme, l’enseignement de la Shoah, la transmission de l’héritage de la culture juive, des programmes sociaux. En 2020, en dépit de la crise sanitaire, plus de 13 M€ ont été attribués à 225 projets.

Annette Wieviorka est membre du conseil d’administration après avoir présidé la commission Mémoire et transmission.


> Véritable « usine à préfaces » comme elle se qualifie elle-même, l’universitaire donne encore de nombreuses conférences avec la Fondation pour la mémoire de la Shoah, et confie s’engager dans d’âpres recherches consacrées à l’histoire de cette famille polonaise dont elle est issue.


> L’historienne a un frère aîné, Michel Wieviorka, né en 1946, sociologue. Une sœur Sylvie Wieviorka, née en 1950, psychiatre, mariée à Alain Geismar, ancien leader de Mai 68, inspecteur général honoraire de l’Éducation nationale, ancien membre du cabinet de Lionel Jospin, en 1991.

Un frère cadet, Olivier Wieviorka, né en 1960, également historien, spécialiste de la résistance française.